Auteur : Freedom house
Site de publication: freedomhouse
Type de publication: Rapport
Date de publication: 2023
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Droits politiques
Un processus électoral
Le président est le chef de l’État et est élu directement pour un maximum de deux mandats de cinq ans. En juin 2019, les Mauritaniens ont élu Mohamed Ould Ghazouani pour succéder à Ould Abdel Aziz, dont le mandat était limité. Ould Ghazouani, du parti Insaf (Équité), alors connu sous le nom d’Union pour la République, a remporté 52 pour cent des voix au premier tour. Le militant anti-esclavagiste Biram Dah Abeid a remporté 19 pour cent. Mohamed Ould Boubacar, le candidat du parti islamiste Tawassoul, a remporté 18 pour cent. L’élection a représenté le tout premier transfert pacifique du pouvoir exécutif en Mauritanie, marquant une rupture avec une histoire de coups d’État militaires.
Les autorités ont rejeté les allégations de l’opposition faisant état d’inconduite et de fraude électorale. Les observateurs locaux et internationaux ont relevé des irrégularités, mais ont salué le déroulement pacifique du scrutin et l’ont jugé globalement satisfaisant.
L’Assemblée nationale, qui compte 157 sièges, est le seul organe législatif du pays ; le Sénat a été dissous dans le cadre de réformes constitutionnelles adoptées en 2017. Les membres sont élus directement pour un mandat de cinq ans selon un système mixte de vote direct et majoritaire ; quatre membres sont élus directement par la diaspora.
L’opposition considère que la Commission électorale nationale indépendante (CENI) est biaisée en faveur du gouvernement, mais la commission sélectionnée en octobre 2022 serait plus équilibrée. En septembre, les partis au pouvoir et d’opposition se sont mis d’accord sur une proposition faite par le ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation concernant l’organisation des prochaines élections parlementaires, municipales et régionales. En décembre, la CENI a annoncé que les élections auraient lieu en mai 2023.
Pluralisme politique et participation
Plusieurs obstacles empêchent les partis de réussir à mobiliser leurs bases. Un décret de 2018 a ordonné au gouvernement de dissoudre tous les partis politiques incapables d’obtenir au moins 1 % des voix lors de deux élections régionales consécutives. En mars 2019, 76 partis ont été dissous en vertu de ce décret. L’Insaf coopte souvent les dirigeants des petits partis.
Même si les candidats de l’opposition peuvent attirer un soutien populaire important, les partis d’opposition manquent de base institutionnelle. Certaines sont formées par des factions dissidentes de l’Insaf qui la rejoignent plus tard, parfois en raison d’une cooptation active. Les dirigeants de l’opposition risquent d’être victimes de répression s’ils critiquent les politiques gouvernementales.
Le groupe ethnique Bidhan domine le gouvernement. Les Noirs mauritaniens et les groupes ethniques Haratin sont sous-représentés aux postes électifs et aux postes gouvernementaux de haut niveau. La discrimination entrave la capacité de ces groupes à accéder au pouvoir. Des milliers de Mauritaniens noirs qui ont été chassés de leurs villages par l’armée en 1989 ont été autorisés à y revenir, mais se heurtent à des difficultés lorsqu’ils tentent de se présenter au recensement et de s’inscrire sur les listes électorales. Des militants de la société civile ont dénoncé l’importance croissante de l’affiliation tribale dans les nominations gouvernementales.
Fonctionnement du gouvernement
L’exécutif domine le pouvoir législatif. Le président a le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale, mais les législateurs ne peuvent pas le destituer. L’armée conserve toujours une influence significative sur l’élaboration des politiques.
Alors que le gouvernement Ould Ghazouani a publiquement exprimé sa volonté de lutter contre la corruption, les critiques ont affirmé qu’il avait utilisé ses efforts anticorruption pour cibler ses opposants politiques. En avril 2022, le Premier ministre Ould Bilal s’est engagé à achever une nouvelle stratégie anticorruption et à professionnaliser les organismes de contrôle.
Liberté d’expression et de croyance
La Mauritanie possède un paysage médiatique dynamique, avec plusieurs journaux, chaînes de télévision et stations de radio privés en activité. Cependant, les journalistes qui couvrent des sujets sensibles ou scrutent l’élite politique peuvent être victimes de harcèlement, d’écoutes téléphoniques et parfois d’arrestations. Plusieurs lois répressives restent en vigueur, notamment celles qui criminalisent la diffamation, la diffusion de fausses informations, la cybercriminalité et le blasphème. Par le passé, les autorités ont régulièrement arrêté des journalistes pour avoir publié des contenus critiques.
La liberté académique est largement respectée. Une règle de 2018 interdisant aux diplômés du secondaire âgés de 25 ans et plus de s’inscrire dans les universités publiques a été suspendue en 2019, après que la police a violemment dispersé une manifestation contre cette politique. Les militants étudiants subissent parfois des pressions de la part des administrateurs universitaires, notamment des menaces d’expulsion et d’intimidation.
En 2021, le Parlement a adopté une loi interdisant « les atteintes à l’autorité de l’État et à l’honneur du citoyen » par des comportements considérés comme portant atteinte à l’unité nationale, y compris via des communications personnelles. Des personnes ont fait l’objet de représailles pour avoir exprimé des opinions critiques à l’égard du gouvernement sur les réseaux sociaux, y compris le licenciement d’agences gouvernementales.
État de droit
Le système judiciaire mauritanien manque d’indépendance. Le président a le pouvoir de nommer unilatéralement de nombreux juges clés, dont trois des six juges de la Cour constitutionnelle et le président de la Cour suprême. Les tribunaux sont soumis à la pression politique du pouvoir exécutif. Des cas de juges confrontés à des mesures de représailles pour avoir rendu des décisions contre le gouvernement ont été signalés.
La torture et les abus se produisent dans les prisons et les centres de détention, et leurs auteurs sont rarement tenus pour responsables. Les prisons sont en proie à la violence, sont surpeuplées et manquent d’assainissement de base ; les pénuries alimentaires sont également courantes. Les enfants sont parfois détenus avec la population carcérale adulte. La police bat fréquemment les suspects après leur arrestation.