Auteurs : Unesco, IIEP Bureau régional pour l’Afrique
Site de publication : UNESCO Bibliothèque Numérique
Type de publication : Rapport
Date de publication : 2024
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Les arbitrages budgétaires publics pour le secteur de l’éducation et la formation
Entre 2014 et 2021, les dépenses publiques totales (courantes et investissements) consacrées à l’éducation et à la formation sont passées de 831 milliards à 1 499 milliards de FCFA, soit une augmentation moyenne annuelle de 8,8 %. En 2021, les dépenses publiques pour l’éducation constituaient 18 % des dépenses publiques totales et 3,8 % du PIB, ce qui correspond à une situation quasiment similaire à 2014 (où les dépenses publiques d’éducation représentaient environ 19 % des dépenses publiques totales et 3,4 % du PIB). Elles sont toutefois en baisse par rapport aux années 2010 où elles constituaient 18,6 % des dépenses publiques totales et jusqu’à 9,7 % du PIB.
Les volumes des dépenses d’investissement dans le secteur de l’éducation ont évolué en moyenne de 10,4 % entre 2014 et 2021. Ces dépenses représentaient 13 % des dépenses totales d’investissement de l’État aussi bien en 2021 qu’en 2014. Toutefois, ces dépenses avaient régressé en 2017 et 2018 où elles représentaient entre 9 % et 10 % de l’ensemble des investissements de l’État.
Analyse des scolarisations, de l’efficacité interne et des enfants en dehors du système éducatif
En matière de croissance entre 2014-2015 et 2020 2021, les différents taux d’accroissement moyens annuels (TAMA) sont élevés, en particulier pour le préscolaire (9,3 %), le secondaire général 1 (9 %), le secondaire général 2 (9 %) et le supérieur (6 %). Les TAMA sont plus modérés pour le primaire (3,3 %) et pour la formation professionnelle (4,1 %) alors qu’il est quasi nul (0,3 %) pour le secondaire technique.
Il est important de signaler une hausse exceptionnelle du préscolaire communautaire (TAMA de 53,6 % sur la période) et une baisse des effectifs du primaire communautaire (-4,2 %) et du public professionnel (-0,2 %). L’évolution au préscolaire est le reflet de la politique de développement de ce niveau de scolarisation à travers l’approche communautaire. De même, globalement, les effectifs du primaire formel ont augmenté, essentiellement grâce aux effectifs scolarisés dans le secteur privé et quelque peu par ceux du primaire public
Accès et achèvement au primaire et secondaire
L’analyse de cette figure montre que le TBA est non seulement élevé (105 %) mais surtout est resté le même en 2014-2015 et 2020-2021. Ces valeurs ne signifient pas pour autant que la Côte d’Ivoire est proche de l’accès universel à l’école, de nombreux enfants entrant dans le système éducatif soit trop tôt (avant 6 ans) soit trop tard (après 6 ans). En 2014-2015, les nouveaux entrants ayant un âge différent de 6 ans représentaient 15 % alors qu’ils étaient 10 % en 2020-2021 à ne pas entrer dans le système éducatif à l’âge théorique. Cette baisse est révélatrice du succès, certes encore timide, des efforts de scolarisation des enfants à l’âge prévu.
Si le TBA s’est dégradé, le profil de scolarisation transversal indique plutôt une amélioration du taux d’achèvement du primaire sur la période d’observation. Estimé à 64 % en 2014 2015, le taux d’achèvement du primaire a gagné 14 points de pourcentage pour atteindre 78 % en 2020-2021.
De même, la transition vers le premier cycle du secondaire s’est nettement améliorée, passant de 87,5 % en 2014-2015 à 98,7 % en 2020-2021. La transition vers le second cycle du secondaire est cependant moins importante, même si elle est également en hausse (60,5 % en 2014-2015 et 65,3 % en 2020-2021).
Accès et achèvement en fonction du genre
Lorsque ces indicateurs sont ventilés par genre, très peu de différences apparaissent entre les filles et les garçons, en particulier au primaire et au début du secondaire 1. Ainsi que le montre la figure 2.6, il n’existe quasiment pas de différences entre les filles et les garçons en ce qui concerne l’accès et l’achèvement du primaire. De même, aucune différence n’est observée au niveau de l’accès au secondaire 1. Les différences deviennent visibles seulement à partir de l’achèvement du secondaire 1 : la figure 2.6 indique que le taux d’achèvement est de 53 % pour les garçons alors qu’il est de 3 points de pourcentage plus faible pour les filles.
Ces différences entre les garçons et les filles continuent pour l’accès au secondaire 2, toujours en défaveur des filles. Cependant, les différences initialement grandes en début de secondaire 2 s’amenuisent vers la fin de ce cycle d’apprentissage puisque le taux d’achèvement des garçons est alors légèrement plus élevé que celui des filles (24 % contre 22 %).
Enfants en dehors du système éducatif
En l’absence de données d’enquête récentes pour effectuer cette estimation, les données de population ont été croisées avec les données administratives afin d’estimer le nombre d’enfants en dehors de l’école. Il ressort qu’en 2020-2021, environ 1 406 983 enfants étaient en dehors du système éducatif. Ce nombre est principalement composé de filles, qui représentent 51 % de cet effectif.
Répartition des dépenses publiques d’éducation, par ministère
L’éducation et la formation en Côte d’Ivoire relèvent de plusieurs ministères dont trois ministères en charge de l’éducation et de la formation et 18 ministères techniques qui offrent des formations dans leurs domaines. Depuis le 6 avril 2021, on distingue le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation (MENA), le ministère de l’Enseignement technique, de la Formation professionnelle et de l’Apprentissage (METFPA), le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique (MESRS) et des ministères techniques (regroupés dans le tableau 3.2 par le vocable « Autres »). Outre ces ministères, des projets d’éducation-formation sont logés à la présidence de la République et à la primature. Ainsi, l’analyse des dépenses d’éducation et de formation devra tenir compte de ces différentes allocations. La distribution des ressources par ministère est indiquée dans le tableau 3.2. Ainsi, 71 % du budget de l’éducation et de la formation ont été alloués au MENA, 20 % au MESRS, 7 % au METFPA et 2 % aux autres ministères.
La croissance des ressources du MENA, du MESRS et du METFPA s’est réalisée au détriment des ministères techniques qui ont vu leurs budgets fortement baisser à partir de 2017. Les ressources consacrées à l’éducation dans ces ministères techniques ont reculé de 79 à 24 milliards en 2021, soit une baisse globale de 69 %.
Reconstitution des dépenses salariales et des effectifs de personnels
De façon générale, les dépenses d’éducation ont connu une tendance à la hausse. La croissance économique observée depuis 2011 a permis un financement de l’éducation régulier et soutenu. Les dépenses salariales représentent le plus gros poste de dépenses courantes (76,7 %), loin devant les transferts au privé (11 %), les transferts courants (5 %), le fonctionnement (3,2 %) et les bourses hors du pays (1,4 %). Au niveau des dépenses courantes, le primaire bénéficie toujours de la plus grande part, soit 35 % et est suivi par l’enseignement secondaire général qui représente 23 %. L’allocation des ressources pour l’enseignement supérieur (11 %) est en baisse comparativement à sa valeur de 2013 (21 %). La part des dépenses courantes consacrées à la formation professionnelle, le préscolaire et le secondaire technique est respectivement de 3 %, 2 % et 1 % des dépenses courantes d’éducation.
Évolution de la masse salariale et du statut des enseignants
En Côte d’Ivoire, la masse salariale des fonctionnaires enseignants du secteur de l’éducation et de la formation a connu une hausse substantielle depuis 2013. Plusieurs raisons expliquent cette évolution, principalement la poursuite de l’application du décret n° 2009-208 du 29 juin 2009 portant fixation des échelles de traitement des fonctionnaires enseignants des emplois du secteur éducation/formation.
Dans un premier temps, en 2013, sont intervenus les paiements de la moitié des 50 % restant des effets financiers du reclassement des enseignants du secondaire général, technique, professionnel et du supérieur ainsi que de la moitié des 50 % restant de la bonification indiciaire des enseignants du primaire et du reclassement des conseillers pédagogiques du préscolaire et du primaire. Ensuite, il y a eu le paiement de la deuxième tranche du rappel du certificat d’aptitude pédagogique (CAP) de 1988 à 1992, d’un montant global de 2 milliards de FCFA et la troisième tranche du même montant en 2014 dans le primaire.
De façon générale, le Gouvernement a donné satisfaction à hauteur de 75 % aux engagements pris avec les syndicats d’enseignants dans la loi de finances 2013 (pour rappel, le Gouvernement avait déjà satisfait à 50 % les revendications salariales induites par le décret de 2009).
Une deuxième raison est le déblocage des avancements indiciaires qui a entraîné une revalorisation des salaires de tous les fonctionnaires, y compris les enseignants en 2015. En moyenne, cette augmentation de salaire est estimée à 12 %.Enfin, en 2018 a démarré le paiement des arriérés de salaire découlant du décret de 2009. Ainsi, la trêve sociale a été obtenue en milieu scolaire et universitaire grâce à l’effort financier de l’État chiffré à 249,6 milliards FCFA. Le Gouvernement s’est engagé à purger cette dette par tranches annuelles selon un calendrier qui a débuté en 2018 et qui prendra fin en 2025.
Contribution des ménages au financement de l’éducation
Les familles scolarisant leurs enfants dans les écoles privées dépensent des montants bien plus élevés pour les frais liés à la scolarité qui représentent plus de la moitié des dépenses d’éducation. À titre d’exemple, les frais de scolarité comptent pour 62 % des dépenses des ménages au préscolaire, 54 % au primaire, 62 % au lycée et 79 % dans le supérieur.
Finalement, on peut faire au moins deux constats majeurs. Le premier est que les familles sont encore fortement sollicitées pour des frais de scolarité non négligeables, ce qui exclut les enfants dont les parents ne peuvent pas faire ces paiements. Le second est que les fournitures scolaires et le transport des élèves représentent une part importante des dépenses des familles.
Personnels enseignants et d’encadrement au primaire
Les enseignants peuvent être répartis suivant plusieurs dimensions : leur diplôme académique, leur diplôme pédagogique et leur emploi. La majorité (48 %) des enseignants du primaire est titulaire du baccalauréat, un tiers est titulaire du brevet d’études du premier cycle (BEPC). Le reste (19 %) est titulaire d’un diplôme supérieur. Si on les répartit suivant leur diplôme pédagogique, ils sont essentiellement titulaires du CAP (quasiment 58 %) et du certificat élémentaire d’aptitude pédagogique (CEAP) (environ 31 %). Les différences de qualification sont très marquées avec les autres types d’écoles. Dans les écoles privées, six sur dix enseignants sont titulaires du BEPC alors que c’est le cas pour 71 % des enseignants des écoles communautaires. En revanche, les enseignants titulaires du baccalauréat sont proportionnellement plus nombreux dans les écoles privées (31 %) que dans les écoles communautaires (25 %). Ainsi, globalement, le niveau de qualification est plus élevé dans les écoles primaires publiques puisque 67 % des enseignants y ont au moins le baccalauréat, contre 40 % des enseignants des écoles privées et 29 % des enseignants des écoles communautaires.
