Auteur: Organisation internationale du Travail
Site de publication: OIT
Type de publication: Rapport
Date de publication: 2020
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L’environnement des entreprises a été marqué ces dernières années par diverses réformes qui ont permis à la Mauritanie de se repositionner positivement dans son classement « Doing business ». Par ailleurs, en 2020, le secteur privé a été fortement touché par la pandémie du Covid-19. L’impact des mesures de confinement sur l’activité du secteur privé se fait déjà sentir sur le terrain.
Face à cette situation imprévisible, et pour contribuer à toutes les réponses apportées par les autorités pour faire face à la pandémie, le BIT se propose de réaliser l’analyse de l’environnement des affaires et d’identifier quelles sont les meilleures stratégies pour affronter à moyen et long terme les différentes contraintes qui se posent aux entreprises.
Lors de la Conférence Internationale du Travail en 2007, les conclusions de la discussion sur la promotion des entreprises durables ont fourni des orientations sur ce qui constitue un environnement favorable aux entreprises durables, en constatant qu’un tel environnement combine la recherche légitime du profit avec la nécessité d’un développement qui respecte la dignité humaine, la durabilité environnementale et le travail décent.
Les axes de l’évaluation de l’environnement des entreprises
Depuis plusieurs années, la Mauritanie s’était engagée dans un vaste programme de réformes juridiques en vue de rendre son environnement plus attractif en termes également de sécurité des affaires.
La Mauritanie, tenant compte de l’intérêt des rapports annuels sur le classement du Doing business, par la suite, adopté diverses mesures et réformes favorables à l’amélioration du climat des affaires. À ce titre, la Mauritanie a simplifié la création des sociétés à travers la mise en place d’un guichet unique en 2014 constituant un service concentré de plusieurs représentants des services publics de l’État ; ce qui facilite le travail des diverses parties mais également pour le demandeur lors de la création de la société.
L’indicateur « Doing business » permet de mesurer le niveau de qualité du climat des affaires dans le pays. Cet indicateur montre que la Mauritanie a connu ces dernières années une évolution relativement favorable pour son environnement des affaires avec l’adoption de plusieurs mesures correctives mises en œuvre par le gouvernement notamment la création d’un guichet unique en 2014, la révision du code de commerce en 2014-2015, la mise en place d’un programme de modernisation de la centrale des risques pour le financement, la création d’un centre d’arbitrage, la création d’un guichet unique dédié pour l’accès à l’électricité, l’adoption d’une loi sur les petits litiges 2017, etc. La Mauritanie est passée d’un score de 44,7 en 2016 à un bon indice de 51,1 pour l’année 2020.
Par rapport aux pays de comparaison, la Mauritanie est en 2020 la moins bien classée avec la meilleure position occupée par le Maroc (73,4), suivie du Sénégal (59,3) et enfin avec le Mali (52,9). Donc, les efforts accomplis par la Mauritanie n’ont pas été suffisants pour occuper un meilleur classement par rapport à ses pays voisins de référence.
Éducation, apprentissage et formation
Dans ce domaine, la politique de l’État a été fortement marquée par le programme national de développement du secteur éducatif couvrant également la formation technique et professionnelle et l’enseignement supérieur. Le taux de scolarisation de l’enseignement fondamental a connu une évolution notable en passant de 68,4% en 2000 à 72,4 % en 2013 selon les données du recensement général de la population et de l’habitat (RGPH). En 2018, ce taux net a atteint un chiffre de 80,6%.
Eu égard à l’importance de l’éducation, la formation et l’apprentissage dans le développement d’un cadre entrepreneurial propice, les indicateurs de référence traités permettent d’avoir une vue sur les enjeux de l’amélioration de la situation favorable des entreprises durables.
La qualité de la formation professionnelle est prise en compte pour mesurer le niveau d’aptitude des bénéficiaires de la formation, le contenu et les conditions de leur réalisation. La note de cet indicateur est évaluée sur une échelle de 1 à 7. Alors, le résultat affiché pour la Mauritanie est moyen, c’est-à-dire à 3,5 sur les deux dernières années. Pour les pays de comparaison, la notation est légèrement supérieure avec une bonne position du Sénégal avec un score qui dépasse la moyenne.
Le niveau de qualification des diplômés constitue une jauge du contenu des formations eu égard aux aptitudes des apprenants en fin de formation. Quant au niveau de qualification de diplômes, le rang occupé par la Mauritanie est également en dessous de la moyenne avec une note de 2,9 pour les années 2018 et 2019. Selon certains acteurs interrogés, les insuffisances apparaissent à travers cet indicateur sont liées au niveau des apprenants mis dans les structures de formation. Les profils ne correspondent pas toujours exactement aux prérequis nécessaires pour pouvoir suivre certaines formations. Ce qui veut dire que la qualité de l’orientation des candidats aux formations n’est pas satisfaisante ou que le suivi du travail des apprenants ou des formateurs devra être réévalué en vue d’identifier les lacunes.
Aussi, certains apprenants n’intègrent pas les centres de formation par vocation du métier ou du diplôme mais à défaut de trouver autre chose. Ce contexte combiné avec les insuffisances soulignées lors de la sélection des candidatures conduit à une baisse de niveau de qualification des diplômés. Dans ce cadre, le renforcement de l’investissement des équipements ou le financement des structures et le renforcement des compétences du personnel de l’encadrement ainsi que du système de suivi évaluation s’impose pour améliorer tout le système.
Commerce et intégration internationale
Le développement commercial de la Mauritanie est principalement marqué par le commerce de biens avec différents pays notamment l’Asie et l’Europe et ses pays voisins (principalement la Chine, UEA, pays UE, pays de la CEDEAO, etc.). Sa part dans le commerce mondial demeure encore très insignifiante, soit moins de 0,01%. Il faut rappeler qu’en 2017 la part des exportations de l’Afrique dans le commerce mondial est de 2,4% et de 3% pour les importations.
La Mauritanie continue de subir principalement des effets de l’inexistence de l’autosuffisance alimentaire entraînant des importations régulières de produits alimentaires grevant son économie.
Au niveau de l’intégration régionale, la Mauritanie est toujours membre de l’Union du Maghreb Arabe (UMA) comprenant également le Maroc, l’Algérie, la Tunisie et la Libye. Il s’agit d’une organisation sous régionale dont les objectifs cadrent avec l’intégration économique. En dépit des nombreux accords économiques, le commerce au sein de cette organisation semble peu développé à l’exception des relations entre la Mauritanie et le Maroc qui sont facilitées par le transport terrestre de marchandises. La part du commerce mauritanien dans l’UMA demeure très restreint avec environ 0,1% des exportations et 3% pour les importations.
Au niveau sud de la Mauritanie, bien que sortie de la CEDEAO en 1999, la Mauritanie a, finalement dans le cadre des accords de partenariat économique entre l’Union Européenne et la CEDEAO, pu signer un accord d’association en date du 5 mai 2017, avec cette dernière dans le but de créer une nouvelle dynamique d’échange et de facilitation du commerce.
L’indicateur sur le commerce de marchandises détermine sa part dans le PIB et montre que la Mauritanie dispose d’un pourcentage très élevé qui varie entre 79 à 96 % durant les cinq dernières. On peut citer, Stratégie pour la croissance accélérée pour la prospérité partagée 2016-2030. années. Cela signifie que la Mauritanie est un pays où le commerce de marchandises est très développé contrairement aux autres secteurs de prestations de services et divers.
Une telle orientation d’activités n’est pas économiquement très souhaitée. Elle présente un risque de plus élevé en cas de contraintes spécifiques touchant les marchandises. Les aléas liés au transport de produits peuvent freiner l’activité économique et plus particulièrement pour les produits alimentaires. Alors l’avantage de la diversification telle que recommandée par diverses stratégies nationales 26 justifie cette impérieuse nécessité sur la production. La promotion des services liés à l’agriculture, à l’élevage et la pêche telle que la transformation des produits pourrait, dans ce contexte, créer d’énormes opportunités transversales directes et indirectes pour le commerce de services.
Les exportations de biens et services de la Mauritanie ont été relativement faibles durant les cinq dernières années. Elles ont connu, dans l’ensemble, une régression significative. Ainsi, le volume des exportations de biens et de services (en USD) est passé de 2,2 milliards en 2015 à 206 millions en 2019. Cette chute peut s’expliquer, en partie également, par la baisse du prix du fer dans le marché mondial occasionnant un effet important sur les recettes des exportations.
Les principales causes des insuffisances du développement de l’entreprise
De manière générale, il est noté la faiblesse de mise en œuvre de certaines politiques et décisions publiques. A ce titre, il a été souligné la faiblesse ou l’absence de formalisation de certains actes. La formalisation de certains actes sociaux est devenue une nécessité pour les relations d’affaires.
Selon tous les acteurs interrogés, la législation fiscale est essentiellement marquée par l’existence de plusieurs charges fiscales et taxes diverses constituant une forte pression financière pour la pérennité des entreprises avec des lourdeurs administratives telles que des déclarations mensuelles obligatoires. Aussi, il a été souligné le besoin de réduire les charges fiscales et accompagner les entreprises pour réduire les effets du covid-19 et mettre en place une politique d’appui aux entreprises qui créent de la valeur ajoutée à la richesse nationale.
Les acteurs interrogés ont fortement souligné l’importation développée de produits alimentaires qui tuent ou empêchent à l’industrie locale de se développer. Pour eux, l’industrie locale subit une concurrence sauvage de produits venant de l’étranger. Il faut dire que les objectifs de production alimentaire n’ont pas pu être atteint pour l’autosuffisance. Par conséquent, une forte demande s’est naturellement créée pour l’importation de produits alimentaires qui connaît des proportions importantes. Aussi au niveau du cordon douanier, elle est marquée, en dehors des vérifications superficielles sur l’origine, la composition et la date d’expiration, par l’inexistence de contrôle de qualité des normes de santé et d’hygiène alimentaire ; ce qui ne semble pas suffisant.
Il a été souligné la très faible organisation des acteurs économiques au niveau de leurs entreprises. Ainsi, les entreprises locales et le commerce national souffrent d’insuffisances dans l’organisation, la disponibilité d’équipements adaptés en termes de normes de qualité pouvant attirer davantage de clients. Alors, un tel contexte ne favorise pas toujours la disponibilité d’un cadre propice pour l’amélioration durable des activités. Et cela est extrêmement important pour les acteurs économiques qui interviennent dans le domaine de la vente de produits alimentaires pour lesquels la conservation exige des conditions minimales notamment pour les équipements et les normes d’hygiène alimentaire.
Les principales recommandations
- Renforcement de la sécurité juridique opérationnelle des affaires : Garantir la disponibilité de l’information commerciale automatisée ; Réduire le développement du secteur informel ; Veiller à la mise en œuvre effective des dispositifs juridiques applicables en matière de justice commerciale.
- Promotion de l’industrie nationale durable et son expansion internationale : Développer et renforcer les capacités du capital humain nécessaire à l’entreprise ; Diversifier la production pour l’autosuffisance alimentaire et l’exportation sous régionale ; Réduire le coût des facteurs de production.
- Développement des infrastructures à impact économique : Initier des projets d’infrastructures de facilitations des échanges et du commerce ; Créer de structures/laboratoires ou élargissement des antennes des centres de contrôle de qualité et d’hygiène ; Renforcer l’adressage physique pour l’identification de tous les acteurs économiques.
L’analyse de l’environnement favorable aux entreprises durables a permis de constater les efforts conséquents réalisés par les pouvoirs publics de Mauritanie notamment durant la dernière décennie. Tant au niveau du cadre institutionnel et juridique qu’au des infrastructures de développement indispensables à la promotion des activités économiques, les réalisations positives ne peuvent être contestées et ont permis à la Mauritanie de bénéficier un très bon classement à travers l’étude de référence en la matière, et qui est le Doing Business. Il reste que le potentiel des activités économiques est encore énorme au regard de la production nationale et des opportunités juridiques dans le cadre des accord commerciaux internationaux comme les APE.