
Les priorités du Sénégal en matière économique « La politique et l’économie ne peuvent être dissociées, car la crise politique actuelle au Sénégal impacte négativement l’économie du pays. Il est important de mettre l’accent sur la gouvernance économique pour préparer le pays aux futurs enjeux concernant la gestion des ressources naturelles. En effet, le Sénégal sera bientôt un pays producteur de pétrole et de gaz. La gouvernance économique concerne le processus décisionnel, et est donc lié à l’investissement et à l’accroissement des ressources au niveau national. Si ces ressources ne sont pas gérées correctement, l’impact attendu de l’exploitation de ces ressources ne sera pas ressenti par les populations. Une bonne gestion pour maximiser les bénéfices auprès des populations est essentielle. Un autre aspect est davantage lié à la conjoncture, il s’agit de la diminution de la cherté de la vie. Le niveau de vie au Sénégal est très cher, notamment à cause de l’inflation galopante. Les manifestations récurrentes s’expliquent en partie par les pénibilités que rencontrent les populations dans la vie quotidienne. Un troisième aspect important que devra prendre en charge le prochain gouvernement est la création d’emplois, car le taux de chômage est très élevé. Plusieurs causes imbriquées expliquent cette crise de l’emploi. Cette dernière entraine une crise de revenus qui impacte directement le pouvoir d’achat. L’accent doit être mis sur la promotion de la création d’emplois. En effet, l’objectif de l’État n’est pas de créer de l’emploi mais de mettre en place les conditions nécessaires pour faciliter la création de l’emploi et promouvoir l’initiative privée. Enfin, la réduction des inégalités est un enjeu majeur. Il y a d’une part les inégalités de revenus, mais également les inégalités d’accès aux services sociaux de base, notamment les structures de santé, d’éducation ou encore d’assainissement de l’eau. Les populations rencontrent des difficultés importantes pour se soigner, même dans les hôpitaux publics et tout le monde n’a pas les moyens de se soigner dans des cliniques privées. L’État a l’obligation de mettre en place des services publics de proximité pour permettre l’accès de toute la population à ces services de base. L’influence de l’exploitation pétrolière sur l’économie au Sénégal Il faut souligner que l’État du Sénégal a essayé de mieux impliquer les entreprises à l’exploitation du pétrole et du gaz. Cette participation passe par la fourniture de services et de matières premières dont l’industrie aura besoin. L’État du Sénégal a voté également une loi portant sur la répartition des ressources issues du pétrole et du gaz. Le gouvernement de l’État du Sénégal a adopté une loi concernant la répartition des ressources issues du pétrole et du gaz. Ce sont des initiatives à saluer. Il faut que ces ressources soient exploitées de manière rationnelle pour que l’exploitation puisse profiter au pays. Cela passe par la création ce qu’on appelle une industrie du pétrole et du gaz. Il ne s’agit pas de se limiter à extraire le pétrole et de le vendre brut à l’étranger et ensuite devoir acheter le produit fini. L’industrie pétrolière, c’est toute une chaine, depuis l’extraction du pétrole jusqu’à la transformation en produits dérivés. Il faut aussi se méfier de ce qui est arrivé dans d’autres pays, la malédiction du pétrole. L’enjeu est de pouvoir profiter du pétrole en mettant en place des gardes fous pour rationaliser l’utilisation de ces ressources notamment pour les générations futures parce que ces ressources sont tarissables. Un fonds de stabilisation a été mis en place dans le cadre de l’exploitation du pétrole. Une partie des ressources de pétrole viendra renforcer la création de la richesse et se verser dans le budget national. Il faut que ces ressources soient orientées pour améliorer l’accès des populations aux services sociaux de base, notamment pour une meilleure éducation, une meilleure santé, l’accès à l’assainissement, une meilleure salubrité. Les couts mondiaux des ressources naturelles ne sont pas fixes, ils varient d’un jour sur l’autre. Ainsi, il est important de diversifier la production du pays. Diversifier les produits à exporter permettrait de ne pas être dépendant de la fluctuation des prix des produits. Il faut également veiller à instaurer un cadre qui définit le rôle de chaque acteur impliqué. Les différentes parties prenantes doivent être représentées : le privé, le public, les acteurs de la société civile. Il faut se féliciter de l’action de l’État pour la transparence des ressources extractives. Chaque année, un rapport est publié et explique quelles ressources naturelles ont été générées par l’exploitation. Cela permet un suivi citoyen. Il est important de veiller à la régularité de la production des rapports annuels. La Cour des comptes a également un rôle important car elle est en charge de valider le suivi et de la vérification des comptes publics. Un plan de gestion environnementale et sociale a été validé. L’enjeu est de veiller à la bonne application des mesures instaurées par ce plan. En effet, souvent, quand le plan est validé, les entreprises n’appliquent pas ces mesures de manière opérationnelle. C’est pourquoi ces plans doivent être accessibles aux populations pour que chacun puisse faire le suivi et le monitoring par rapport aux différents engagements pris par les entreprises. Ainsi, il y a aujourd’hui un cadre défini, il faut désormais s’assurer qu’il soit respecté. Les aspects environnementaux, mais également les aspects de transparence financière dans l’exploitation de ces ressources seront mieux pris en compte. Les mesures pour le prochain président en matière de création d’emplois, réduction du chômage et l’immigration illégale L’immigration a toujours existé mais ce phénomène s’est exacerbé à cause du contexte politique. Les jeunes sont désespérés au point de prendre des pirogues de fortune ou de traverser le désert pour aller à l’étranger. Il n’y a plus d’espoir au niveau national. La confiance des jeunes envers le gouvernement est rompue. Ils estiment que les gouvernants n’œuvrent pas pour leur bien. La question de l’emploi est centrale. Il faut mettre en place une stratégie intégrée qui prenne en charge le chômage. La question de l’emploi ne concerne pas uniquement les entreprises. Il faut s’attaquer à la source des problèmes, soit l’inadéquation de la formation et du marché de l’emploi. L’offre de l’emploi est supérieure à la demande de l’emploi qui émane des entreprises. Même pour les jeunes qualifiés, trouver un emploi est difficile. Souvent, l’enseignement général ne fournit pas les compétences et les capacités d’emploi pour assurer l’employabilité des jeunes. Les entreprises qui recrutent cherchent à accroitre leur chiffre d’affaires en misant sur la productivité des jeunes. Le prochain président devra mettre en place une vraie stratégie intégrée qui concerne à la fois la formation et l’entrepreneuriat. Si les jeunes retrouvent l’espoir de réussir sur place, ils n’auront plus de raisons d’aller ailleurs. Redonner de l’espoir aux populations est de la responsabilité des autorités. Un des principaux chantiers du nouveau Président sera de travailler à établir une confiance entre lui et la population. Cela passe notamment par une gestion transparente et une bonne gouvernance des ressources du pays. Ainsi, les jeunes, au lieu d’investir beaucoup d’argent dans leur départ vers l’étranger, pourront investir dans leur futur dans le pays. Il faut qu’ils aient de nouveau une vision de long terme dans leur pays, la perspective d’un bon futur.
Le prochain président devra mettre en place une vraie stratégie intégrée qui concerne à la fois la formation et l’entrepreneuriat
La migration est aussi une problématique sociologique parce que ce sont parfois les parents qui incitent les jeunes à partir. A cela s’ajoute le contexte politique et économique du pays. Ce cocktail pousse les jeunes à migrer. Les priorités globales nationales pour assurer le bien-être des populations La première priorité est que les populations puissent accéder à un travail décent. Il faut mettre en place des conditions favorables à la création de l’emploi. Comme précédemment mentionné, l’ambition de l’État n’est pas de créer de l’emploi mais de mettre en place les conditions favorables à la création de l’emploi. Ainsi, le secteur privé pourra se développer et offrir de nombreuses possibilités d’emploi aux jeunes. En parallèle, l’État devrait travailler sur l’accessibilité aux services sociaux de base. C’est à l’État que revient la responsabilité de mettre à disposition de la population des services de santé, d’eau et d’éducation de bonne qualité sur tout le territoire national. Ce sont les conditions à réunir pour construire un avenir prometteur. Il est aussi nécessaire d’améliorer la gouvernance. En effet, le Sénégal est décrié partout comme un pays où la mal gouvernance prévaut. Il faut faire respecter les règles déjà en place. Cela passe par exemple par veiller à la régularité de publication des rapports d’audit de la Cour des comptes pour lutter contre l’impunité. Il faut s’assurer que les autorités qui gèrent les ressources des populations le fassent correctement et soient sanctionnées si ce n’est pas le cas. Actuellement il n’y a aucune application de sanctions aux personnes qui ont fauté. Le prochain président, dès son début de mandat, doit rassurer la population et travailler dans une perspective d’amélioration des conditions de vie. A l’échelle nationale, l’État central a mis en place le plan national d’aménagement et de développement du territoire. C’est une première initiative qui vise à promouvoir le développement des territoires. L’Acte III de la décentralisation avait posé les prémices de ce qu’on appelle la territorialisation des politiques publiques. Ces initiatives doivent se traduire par une réalité sur le terrain, pour les populations. Bien que les collectivités territoriales aient la possibilité de territorialiser les politiques publiques, elles n’ont pas assez de moyens.
C’est à l’État que revient la responsabilité de mettre à disposition de la population des services de santé, d’eau et d’éducation de bonne qualité sur tout le territoire national
L’État doit accompagner ce transfert de compétences par la mise à disposition de ressources. Il faut donner plus de poids à l’acte trois de la décentralisation qui oriente les collectivités vers la territorialisation des politiques publiques. L’État doit également accompagner la mise en œuvre du plan national d’aménagement et de développement des territoires qui met l’accent sur le poids démographique. Le poids démographique est important et les services doivent suivre. Les stratégies sont déjà là, il faut désormais s’assurer de leur bonne mise en œuvre pour prendre en charge ces questions d’inégalités. Dans certains départements, beaucoup de services sont manquants. Certaines régions n’ont pas d’hôpitaux de niveau trois, ce qui oblige les populations à venir à Dakar uniquement pour se soigner ou pour faire des analyses. En plus du coût d’accès aux soins, le ticket pour venir à Dakar, mais également le ticket pour se loger. A cause de ces nombreux coûts, une partie importante de la population ne se soigne pas ».